Fri. Nov 22nd, 2024

Si jusqu’aux années 1970, la dette publique française était faible, elle a depuis connu une progression rapide, conséquence d’une accumulation de déficits publics. Face aux crises qui se sont succédé, les gouvernements ont opté pour une augmentation des dépenses publiques. Jusqu’à maintenant, le financement de la dette publique n’a pas posé de réel problème à la France, l’écart avec le taux allemand restant stable autour de 0,6 point. 

 

50 ans de progression de la dette publique en France 

 

Le taux d’endettement public de la France est passé de 14,5 % du PIB en 1974 à 111,8 % du PIB au 2e trimestre 2023. La progression a été particulièrement forte au début des années 1990, entre 2007 et 2010 et entre 2020 et 2021.

Des déficits publics toujours plus hauts à chaque crise

L’endettement public s’est accru en raison de l’accumulation de 50 années de déficits publics. À chaque crise, ceux-ci augmentent sans revenir à leur niveau d’origine. 

L’apparition des déficits publics durant la présidence de Valéry Giscard d’Estaing (1974-1981) est imputable aux deux chocs pétroliers qui ralentirent la croissance et qui obligèrent l’État à soutenir plusieurs secteurs d’activité dont la sidérurgie. Les déficits demeurent alors néanmoins limités. De 1974 à 1980, le déficit moyen est de 1,2 % du PIB, la dette publique représentant en 1980 un cinquième du PIB.

François Mitterrand avec sa politique de relance se traduisant par une forte augmentation des dépenses sociales accroît fortement le déficit public. Il atteint 2,8 % en 1982 et dépasse 3 % du PIB en 1986. Avec la récession de 1993, le déficit atteint 6,4 % du PIB. Grâce au retour de la croissance, celui-ci diminue entre 1995 et 2000. Il passe de 5,1 à 1,3 % du PIB. Le ralentissement de la croissance intervenu ensuite, engendre une hausse des déficits après 2002 pour atteindre plus de 4 % du PIB en 2004. La crise des subprimes durant la présidence de Nicolas Sarkozy (2007-2012) provoque une nouvelle envolée du déficit public qui dépasse 7 % en 2009. De 2012 à 2017, sous la présidence de François Hollande, les déficits publics sont réduits. Ils passent durant le quinquennat de 5 à 3 %. Le processus de baisse s’interrompt en 2019 sous la présidence d’Emmanuel Macron et atteint le niveau de 9,1 % du PIB en 2020 avec la crise sanitaire. Depuis, le déficit public reste supérieur à 4,5 % du PIB. Après avoir été de 4,7 % du PIB en 2022, il devrait s’élever à 4,9 % du PIB en 2023. Pour 2024, le projet de loi de finances prévoit un déficit de 4,4 % du PIB. 

 

Entre 1974 et 2023, les dépenses publiques ont eu tendance à augmenter plus vite que les prélèvements obligatoires, ce qui explique le déficit public récurrent de la France. Sur cette période, les dépenses publiques sont passées de 40 à 57 % du PIB et les prélèvements de 34 à 45 % du PIB.

 

Une divergence avec l’Allemagne depuis 20 ans

 

Avec l’Allemagne, la France a commencé à réellement diverger à partir de 2003 pour les déficits publics et à partir de 2010 pour la dette publique. Pour cette dernière, l’écart est désormais de 50 points de PIB en défaveur de la France. Dans les années

1970, la dette publique allemande était supérieure de 5 points à celle de la France.

L’Allemagne a réussi à renouer avec des excédents budgétaires entre 2013 et 2019, ce qui lui a permis de réduire de 20 points son endettement public.

 

L’assainissement des finances publiques en Allemagne est essentiellement la résultante de l’amélioration sensible du taux d’emploi qui est passé de 66 à 77 % de 2003 à 2023. Le taux d’emploi de la France en 2023 est près de 10 points inférieur à celui de l’Allemagne et son augmentation est récente (2019). Si la France avait le même taux d’emploi que l’Allemagne, elle aurait, toute chose étant égale par ailleurs, un solde budgétaire légèrement positif. 

 

La France plus dépensière que l’Allemagne sur de nombreux postes

 

Que ce soit en matière de retraites, d’éducation, de logement, la France dépense plus que l’Allemagne. 

 

Les dépenses publiques de retraite sont passées en France de 8 à 14 % du PIB de 1980 à 2023 et de 11 à 10 % du PIB en Allemagne qui a adopté des réformes structurelles de grande ampleur dans les années 2000. Pour l’éducation nationale, l’Allemagne y consacrait 4,5 % du PIB en 2022, contre 5,5 % du PIB pour la France sans que cela se traduise par un avantage concurrentiel pour cette dernière au vu des derniers résultats de l’enquête PISA de l’OCDE. En 2022, la France dépensait plus en matière de logement et famille que l’Allemagne : 3,1 % du PIB contre 2,2 % du PIB. Au vu de la crise immobilière, cet écart ne semble pas justifié. Les dépenses militaires représentaient 1,4 % du PIB en Allemagne et 1,9 % du PIB en France. En revanche, en matière de santé, les deux pays sont assez proches, 8,8 % du PIB pour l’Allemagne et 9,1 % du PIB pour la France. Si la France a longtemps dépensé plus que l’Allemagne pour soutenir son économie, ces dernières années, cette dernière a accru ces dépenses en la matière. La France y consacre 7,5 % de son PIB et l’Allemagne 6 % de son PIB. Enfin, ces deux pays consacrent la même part de leur PIB à la sécurité publique et à la justice (1,7 % du PIB). 

 

Après la crise des dettes souveraines (2010/2013), la question du taux d’endettement public avait disparu du débat public en France en raison de la baisse des taux d’intérêt. L’État a réussi en 2020 et en 2021 à s’endetter à taux négatif. 

Avec le relèvement des taux directeurs et la fin des achats d’obligations par la BCE, les taux d’intérêt à long terme sont à la hausse. Tant que le taux d’intérêt est inférieur au taux de croissance à long terme, le taux d’endettement public converge vers une limite stable, puisque la croissance rembourse la dette publique. En 2022/2023, la hausse de l’inflation a conduit à une baisse du taux d’endettement public puisque l’inflation était nettement supérieure au taux d’intérêt à long terme. Le PIB augmente plus vite que la dette publique et les taux d’intérêt réels sont négatifs. Mais avec la désinflation, l’affaiblissement de la croissance et le maintien de taux élevés, la situation pourrait à terme se compliquer sur le front de la dette publique. Le recul de la productivité du travail constitue une réelle menace car il diminue le potentiel de la croissance. Entre 2019 et 2023, la productivité par tête a reculé de 6 % en France. L’augmentation des taux d’intérêt renchérit par ailleurs le service de la dette qui pourrait devenir le premier poste budgétaire d’ici 2027. 

 

Par le Cercle de l’Épargne – données Banque de France 

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