Fri. Oct 4th, 2024

Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés chez IG France

 

Les marchés connaissent une accalmie depuis quelques jours en raison de plusieurs facteurs déjà connus : les interventions historiques de la Fed et de la BCE et les mesures de soutien économique prises par les gouvernements en Europe et aux Etats-Unis.

Mais la décision de l’administration américaine de ne pas faire appliquer un confinement généralisé a également été un moteur haussier pour les marchés ces derniers jours, le président américain répétant tous les jours sa volonté de ne pas « fermer l’économie » américaine ce qui ferait, selon lui, plus de victimes que le coronavirus. Malgré une position beaucoup plus prudente de Anthony Fauci, le président de l’Institut National des Allergies et maladies Infectieuses qui intervient régulièrement à ses côtés lors des conférences de presse de la « Coronavirus Task Force », Donald Trump ne souhaite pas suivre l’exemple de la Chine ou de l’Europe pour impacter le plus faiblement l’activité économique. Et cette position plait forcément aux marchés…mais jusqu’à quand ? Si la progression du coronavirus accélère aux Etats-Unis et s’étend en dehors des « hot spots » comme l’Etat de New-York par exemple, et nécessite de prendre des mesures de confinement beaucoup plus agressives, le retour de bâton pourrait être violent pour les marchés, car l’économie ayant déjà fortement ralenti, des décisions retardées pourraient rallonger la durée de l’épidémie aux Etats-Unis et perturber plus longtemps l’activité.

Donald Trump souhaite qu’un assouplissement des mesures de confinement existantes et qu’une « réouverture » de l’économie aient lieu d’ici Pâques, ce qui pourrait n’être qu’un vœu pieux…

Et la crainte des autorités sanitaires américaines est bien présente, notamment celle de voir une dissémination du coronavirus sur une partie plus large du territoire après l’exode d’américains en dehors des grandes villes comme New-York. Une période de quarantaine de 14 jours leurs a été demandée par Deborah Birx qui coordonne les actions face au coronavirus au sein de la Maison Blanche.

L’OMS a lancé un avertissement indirect aux Etats-Unis, indiquant que le territoire américain avait le potentiel pour devenir « le nouvel épicentre » du coronavirus.

Nous sommes donc face à une situation très particulière aux Etats-Unis : soit Donald Trump fait un pari en n’accentuant pas les mesures de confinement et l’épidémie se calme rapidement avec un impact un peu moins important sur l’économie américaine qu’ailleurs, soit le pari du président américain va déboucher sur une flambée du nombre de cas, avec un rejet massif de cette stratégie par les américains (ce qui pourrait lui coûter la présidentielle) et des mesures prises avec plusieurs semaines de retard qui coûteront beaucoup plus cher à l’économie américaine, entrainant une nouvelle poussée de fièvre des marchés.

En parallèle de la situation sanitaire américaine, les marchés surveilleront un segment sous forte pression depuis le début de l’épidémie : le secteur des obligations d’entreprises et notamment la partie la plus mal notée par les agences, le high yield. Plusieurs dégradations de notes sont tombées ces derniers jours, notamment dans les secteurs pétroliers et aériens et la tendance devrait se poursuivre à court terme. Après la petite accalmie observée en ce début de semaine sur ce segment, il convient de le surveiller avec beaucoup d’attention, des écarts de taux significatifs s’étant formés entre les obligations bien notées et les autres. Le risque obligataire reste très présent car le risque de faillite est très important, malgré les plans d’aides historiques annoncés.

Il est évident que toutes les entreprises ne survivront pas à cette crise. La principale interrogation est de savoir si un défaut majeur peut intervenir, celui d’une ou plusieurs grandes entreprises, de nature à faire plonger les marchés plus fortement, comme ce fut le cas lors de la bulle internet ou de la crise des subprimes.

 

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