Sun. Dec 22nd, 2024

Par Florian Allain – gérant actions chez Mandarine Gestion

Alors de les banques centrales et les Etats appellent les entreprises à ne pas verser de dividendes pour concentrer leurs financements sur la sauvegarde de leurs activités et des emplois, la réaction de plusieurs secteurs, et notamment des banques, se fait attendre.

 

DIVIDENDES : LES BANQUES CEDERONT-ELLES AUX INJONCTIONS MORALES ?

« L’Autorité Bancaire Européenne a, dès le 12 mars, appelé les banques à la prudence concernant leurs dividendes et les autres formes de distribution (rachat d’actions mais aussi bonus). Le 25 mars 2020, la FSA, le régulateur norvégien des banques et des assurances a ainsi proposé au Ministère des Finances d’interdire purement et simplement la distribution de dividendes pour ces deux secteurs. Les régulateurs suédois, Tchèque et hongrois ont également plaidé pour des réductions ou suspensions de dividendes. La BCE a fini par émettre un avis équivalent le 27 mars demandant que les banques ne versent « pas de dividendes pour les exercices 2019 et 2020 jusqu’au 1er octobre 2020 au moins ».

Les Banques Européennes ont bien entendu conscience de la situation et Jean-Pierre Mustier, président de la Fédération Bancaire Européenne, a essayé de faire émerger une position commune. A l’heure où nous écrivons ces lignes, cette position commune n’est toujours pas d’actualité : les grandes banques suisses entendent pour le moment maintenir leur dividende alors que plusieurs banques de l’Union Européenne comme ING ou KBC viennent de se conformer à la demande de la BCE.

En théorie, les banques ont les moyens de payer ces dividendes, ayant pour la plupart des niveaux de fonds propres très supérieurs aux contraintes règlementaires. Cependant les régulateurs et gouvernements mettent en avant les aides dont elles bénéficient (amélioration des conditions de financement du nouveau LTRO de la BCE, décalage des Stress-test bancaires à 2021, assouplissement des contraintes lié aux normes comptables IFRS 9 …) et souhaitent avant tout que les banques en profitent pour continuer à financer l’économie et renforcer leurs fonds propres. En simplifiant, on peut dire qu’il s’agit d’aides avec une contrepartie explicite, le financement de l’économie « réelle », et une contrepartie implicite, la suppression des dividendes.

A l’impératif économique s’ajoute donc aussi un impératif « moral ». Les gouvernements ne veulent surtout pas que l’opinion publique, victime de la crise sanitaire et de ses répercussions économiques, ait le sentiment que les banques ne contribuent pas à l’effort général et privilégient leurs actionnaires alors qu’elles bénéficieraient elles-mêmes de soutien. Le risque cependant est qu’en faisant fuir les actionnaires du secteur bancaire et en renchérissant de ce fait leur coût du capital, on ne se retrouve avec une situation paradoxale et contraire à l’objectif initial. Au lieu de permettre aux banques de financer les entreprises et les particuliers à des coûts modestes, les banques seront contraintes de réduire leur production de crédit et de proposer des financements nettement plus onéreux.

Cette situation n’est pas totalement inédite ; les banques, coupables désignés de la précédente grande crise financière ont également eu à suivre des injonctions similaires en 2008/2009 ou en 2011/2012 lors de la crise de la zone Euro. Les assureurs avaient toutefois été jusqu’ici épargnés, or il semble que cette fois la pression augmente sur leur politique de distribution de bénéfice, à l’image de la réduction de moitié du dividende de l’assureur danois Topdanmark. ».

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