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Par Christophe Donay – Responsable de l’allocation d’actifs et de la recherche macroéconomique, chef stratégiste, Pictet WM

L’éventualité d’un ralentissement marqué, voire d’une récession aux Etats-Unis fait débat depuis quatre ans. Si nous avons jusqu’ici considéré que les mécanismes endogènes étaient suffisamment puissants pour écarter ce scénario, l’année 2020 pourrait être différente. Pourquoi ?

Parce qu’une accumulation de forces conduisant à une récession a formé une vague, dont l’onde de propagation a débuté avec la guerre commerciale. Elle se propage par étapes, selon une séquence imparable.

 

Une séquence dont la finalité est une récession

L’étape d’une contraction du commerce mondial a été franchie, à un rythme annualisé de 2.7%. La confiance des dirigeants d’entreprises s’effrite, touchant à son tour l’investissement productif, pour lequel nous anticipons un affaissement de l’ordre de 1,5% aux Etats-Unis. Le cycle de l’emploi est fragilisé, avec à la clé une détérioration de la confiance des consommateurs et un déclin de la consommation. La finalité de cette séquence est une récession.

Notre scénario 2020 pour les Etats-Unis est celui d’un ralentissement marqué, avec une croissance réelle de 1,3%, contre plus de 2% depuis plusieurs années. Hors Etats-Unis, nous anticipons également un ralentissement, avec une croissance inférieure au potentiel. En Chine par exemple, elle devrait fléchir à 5,9%, alors qu’en zone euro, nous anticipons une expansion réelle de seulement 1%. La France devrait mieux résister, avec une activité réelle en progression de 1,2%.

 

Au mieux, la croissance se stabilisera sur un niveau plus bas

Stopper la propagation de cette vague de ralentissement suppose soit une résolution de la guerre commerciale, soit une politique économique stimulante ou une combinaison des deux. Une trêve dans le conflit commercial Etats-Unis-Chine paraît probable. En revanche, l’intégration d’un scénario de politique de relance économique combinant efficacement les piliers monétaires, fiscaux et budgétaires nous paraît difficile, ces derniers dépendant de l’obtention d’une majorité dans les cénacles étatiques. Au mieux, les plans de politique économique permettront tout juste de stabiliser la croissance à un niveau plus bas, en évitant la récession stricto sensu.

Les pressions inflationnistes sont faibles. Les taux d’inflation sous-jacents devraient s’établir en dessous de 2%. Nous écartons le pétrole comme source d’inflation, avec un scénario de baisse du brut à 51 dollars/baril, en soulignant toutefois le risque géopolitique.

 

Des rentabilités plus faibles, en ligne avec nos attentes à long terme

Après une année 2019 exceptionnelle, les rentabilités des principales classes d’actifs devraient être plus en ligne avec nos attentes à long terme : après une hausse de 25% des actions des marchés développés, la performance devrait s’établir à un chiffre en 2020, soit environ 5%, soutenue principalement par le rendement des dividendes et par les programmes de rachats d’actions particulièrement aux Etats-Unis. Les actions des pays émergents devraient souffrir de la baisse combinée du commerce et des prix du brut, entraînant une correction de l’ordre de 5%.

Les banques centrales resteront très accommodantes en maintenant leurs taux d’intérêt à des niveaux très bas. Nous anticipons quatre baisses de 25pb de la part de la Réserve Fédérale et un statu quo à la BCE. Une croissance faible et l’absence d’inflation favorisera une stabilisation des taux du Trésor américain à 10 ans autour de 1,6% et une légère hausse des taux allemands de même échéance, offrant une rentabilité totale d’environ 2,5% et -1,2% respectivement. Les obligations souveraines demeurent à un actif de protection que nous considérons dans une allocation diversifiée et équilibrée.

 

L’allocation d’actifs passe notamment par le private equity et l’or 

Les écarts de rendement (spreads) des obligations d’entreprises devraient se tendre, surtout ceux du segment à haut rendement (High Yield) américain, dont la proportion de notations CCC est supérieure à son équivalent en euros. Le segment de qualité (Investment Grade) pâtit d’un rendement peu attractif. Les obligations émergentes en monnaies locales bénéficient d’un rendement plus élevé et d’une rentabilité totale attendue de l’ordre de 5%.

Les actifs illiquides, en particulier le private equity, devraient offrir une rentabilité à la fois plus stable et plus élevée, de l’ordre de 10%. A ce titre, une allocation d’actifs stratégique de type endowment nous paraît plus appropriée que les allocations traditionnelles.

Enfin, nous favorisons l’or physique, dans le cadre d’une approche diversifiée de construction de portefeuille, selon le scénario que nous avons retenu. Les risques sont nombreux, tant sur les plans économiques, que politique ou géopolitiques. Les issues du Brexit, des élections américaines, des tensions en Espagne, en Italie ou encore au Moyen-Orient sont à la fois incertaines et imprévisibles.

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