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Relancer l’économie sans pour autant céder à la facilité de reporter à plus tard les ambitions climatiques du Green deal européen.

La Commission européenne et les États membres réfléchissent ensemble à une relance économique qui serait grise (reprise économique rapide en freinant le calendrier des réformes écologiques) ou verte (maintenir les réformes écologiques au risque d’un ralentissement de la reprise).

Pour relancer l’économie sans sacrifier la transition environnementale, il semblerait que l’instauration d’une taxe carbone aux frontières européennes permettrait de concilier ces 2 approches et aurait de nombreux avantages :

  • Taxer l’importation de marchandises afin de corriger l’écart de compétitivité existant entre les entreprises européennes soumises au marché carbone et les entreprises étrangères soumises à des normes environnementales souvent moins contraignantes,
  • Être déjà prévu dans le Pacte vert européen et soutenu jusqu’à présent par Emmanuel MACRON et Engela MERKEL,
  • Générer des recettes fiscales importantes qui permettront de financer des projets environnementaux ou de soutenir le tissu industriel européen.

L’accélération du Green deal pour favoriser une reprise économique rapide et écologique

Par Maître Matthieu TORET – Cabinet ENERLEX

Alors que se pose la question des modalités de reprise économique de l’Union européenne suite à la
crise sanitaire à laquelle chacun des pays membres est actuellement confrontée, et après s’être concerté
avec la chancelière allemande Angela Merkel, Emmanuel Macron a, lors de sa conférence de presse du
18 mai, semble-t-il tranché le dilemme entre ralentissement ou accélération du calendrier de mise en
œuvre du Pacte vert européen (plus connu sous sa dénomination originale « Green deal »). Le
Président de la République a déclaré que « le Green deal, cette transformation verte de notre
économie, ne doit pas être remise en cause, elle doit être accélérée ».
Le Green deal devrait donc être l’un des outils de financement du plan de relance massif via
notamment l’instauration d’une taxe carbone aux frontières.

Un plan de relance massif attentif aux impératifs écologiques

Le plan de relance européen alors proposé par le couple Franco-Allemand ─ consistant en une
mutualisation de la dette européenne à travers la souscription d’un emprunt de 500 milliards d’euros
sur les marchés financiers ─ a depuis été formalisé par la Commission européenne, qui a revu son
montant à la hausse, et son montant porté à 750 milliards d’euros.

Ce plan ─ baptisé Next Generation EU ─ s’appuiera sur 3 piliers, dont l’octroi d’aides financières aux
États membres, afin de les accompagner pour se remettre de la crise. A ce titre, certaines mesures
envisagées par l’Union européenne visent à inscrire le Pacte vert européen au cœur de ce plan de
reprise. D’une part, et afin de soutenir la mutation écologique vers une économie neutre pour le climat,
il est envisagé d’allouer 40 milliards d’euros au Fonds pour une transition juste. D’autre part, et afin
d’aider les zones rurales à opérer les changements structurels nécessaires à une transition vers une
agriculture plus respectueuse de l’environnement, le Fonds européen agricole pour le développement
rural se verra doté de 15 milliards d’euros.

De manière générale, afin de se qualifier au bénéfice du financement au titre de ce plan de relance, les
investissements publics nationaux devront respecter le serment « ne pas nuire », et amorcer la
transition de leurs économies vers la réduction des émissions de carbone.

L’accélération du Green deal

Pour rappel, le « Green deal » est le projet majeur de la politique promue par la Présidente de la
Commission européenne, Ursula von der Leyen, dont le mandat a pris effet en 2019.
Celui-ci a pour objectif de faire de l’Union européenne un leader mondial en matière de transition
écologique, en propulsant l’Europe au rang de premier continent climatiquement neutre, tout en
garantissant une stratégie de croissance, à horizon 2050. Un point d’étape est prévu dès 2030 : l’Union
européenne devra avoir réduit d’au moins 50% ses émissions de gaz à effet de serre (par rapport à
1990).
Afin d’atteindre ces objectifs ambitieux, il est prévu de passer toutes les politiques européennes au
scanner des impératifs environnementaux. Cette mise en conformité du droit de l’Union européenne ─
au titre duquel est notamment envisagé de refondre le régime de taxation des énergies, inchangé
depuis 2003, et impactera nécessairement tous les secteurs d’activités (de la sidérurgie à l’industrie
automobile, en passant par le secteur agricole et l’aéronautique).
Cette volonté de placer l’impératif de transition écologique au cœur de la politique européenne en cette
période de reconstruction économique s’illustre d’ailleurs également par la présentation par la
Commission européenne le 20 mai 2020 de sa feuille de route relative à la nouvelle stratégie en faveur
de la biodiversité et à celle dite « De la ferme à la table ».

La taxe carbone aux frontières, source probable de financement du plan de reprise économique

La prise en compte des impératifs environnementaux dans la définition du plan de relance européen se
révèle non seulement au regard des mesures dont le financement est envisagé telles qu’elles viennent
d’être présentées, mais également s’agissant des modalités de remboursement du prêt souscrit qui sont
actuellement à l’étude.

Alors même qu’elle avait été évoquée lors de la présentation du Green Deal l’année dernière, la
création d’une taxe carbone aux frontières consistant à soumettre à un prélèvement les produits en
provenance d’Etats tiers à l’Union et présentant un « coût carbone » élevé ─ depuis renommé
mécanisme d’ajustement carbone aux frontières ─ est plus que jamais d’actualité.
Outre les effets positifs que présenteraient un tel mécanisme (réduction de l’écart de compétitivité les
industriels européens et leurs concurrents étrangers, et relocalisation d’industries sur le territoire
européen), la source de trésorerie qu’il pourrait constituer permettrait de rembourser l’emprunt souscrit
pour reconstruire l’économie européenne, comme l’a d’ailleurs récemment suggéré Thierry Breton, le
Commissaire européen au marché intérieur, et comme l’a encore plus récemment confirmé Ursula von
der Leyen.

Si jusqu’à présent, la taxe carbone avait parfois été perçue comme une nouvelle contrainte, un surcoût
ou encore un frein à la reprise économique, son opportunité, ses avantages tendent maintenant à
prendre le dessus dans le contexte du Covid-19.
Cependant, s’il a déjà reçu le soutien de la plupart des Etats européens, dont la France, l’Allemagne et
l’Espagne, ce plan de relance européen doit encore être adopté par les 27 Etats de l’Union européenne
via le Conseil européen, dont la prochaine réunion est fixée au 19 juin 2020.

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