Par Alexandre Baradez, responsable de l’analyse marchés chez IG France
Donald Trump a fait le choix de frapper plus fort ses voisins que la Chine : 25% de taxes sur les importations du Canada et du Mexique et 10% pour la Chine, l’Europe attend toujours d’avoir les détails de la future politique commerciale américaine la concernant.
Le Canada a déjà annoncé des mesures de rétorsion soit 25% de taxes douanières portant sur 107 milliards$ d’importations de produits américains. De son côté, la présidente mexicaine a indiqué qu’elle donnerait les détails des contremesures dès aujourd’hui. La Chine a également annoncé qu’elle adopterait des mesures de rétorsion sans toutefois donner plus de détail à ce stade.
Même si Donald Trump n’a pas encore précisé ses intentions concernant l’Europe, il a toutefois assuré que les taxes « allaient arriver » et l’Europe a également fait comprendre que des mesures seraient prises en réponse à de futures taxes américaines.
L’euro a décroché de 1.4% dans les échanges dimanche soir, proche de 1.021$ contre 1.036$ vendredi et le CAC40 abandonne 2% à l’ouverture en ce début de semaine. Le taux 10 ans allemand se replie à 2.42% ce matin contre 2.47% vendredi soir.
Les marchés américains ne sont pas épargnés non plus, les Futures sur le Nadaq100 ont ouvert en forte baisse de 2.5% et plus de 3% de baisse pour l’indice Russell2000 des petites et moyennes capitalisations. Le VIX, indice de volatilité du SP500, bondit de 22% ce matin.
Ça commence à faire beaucoup, même pour les indices américains car ces annonces commerciales interviennent au moment où la Fed a décidé de faire une pause sur ses baisses de taux.
L’inflation PCE, mesure d’inflation préférée de la Fed, celle qu’elle utilise dans ses projections trimestrielles, est ressortie à 2.8% vendredi, marquant un sixième mois consécutif sans nouveau progrès vers l’objectif de 2% de la Fed. Elle a même un peu rebondi sur cette période de deux trimestres, passant de 2.6% à 2.8%. Même si nous sommes loin du pic de 2022 à 5.6%, l’absence de progrès a bien évidemment été remarquée par la Fed, ce qui a justifié le changement de discours de Jerome Powell en décembre mais également en janvier.
Le taux 10 ans américain est relativement stable à 4.55% ce matin. D’un côté, la question du risque de telles mesures pour l’économie américaine se pose ce qui devrait plutôt imprimer une pression baissière sur les taux américains…mais de l’autre côté le risque d’un rebond temporaire de l’inflation lié aux taxes douanières se pose également, ce qui exerce plutôt une pression haussière sur les taux. Il y a quelques jours, un membre de la Fed expliquait que ce n’est pas une hausse unique des taxes commerciales qui présente un risque haussier pour l’inflation mais plutôt un processus étalé dans le temps avec des mesures de rétorsion.
Des marchés américains qui avaient aussi été secoués par l’épisode DeepSeek il y a quelques jours, la question de la vitesse et du coût de développement des intelligences artificielles chinoises s’imposant brutalement, soulevant automatiquement la question de la rentabilité des gigantesques investissements réalisés par les géants de la tech US.
Nous sommes peut-être entrés dans une phase de volatilité plus durable pour les marchés américains dont les niveaux de valorisation sont désormais incompatibles avec l’ensemble de ces risques : inflation collante, pause dans les baisses de taux de la Fed, concurrence chinoise sur l’IA et désormais guerre commerciale.