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Chute du gouvernement Bayrou, annonces BCE/FITCH… quel impact sur la dette ?

Ivo Martens, CRO d’iBanFirst, spécialiste des paiements internationaux pour les SMM (PME internationales)

L’issue de la réunion du 11 septembre de la BCE ne sera pas une surprise. Au cours de l’été, sa présidente, Christine Lagarde, a clairement affirmé qu’une nouvelle baisse des taux n’était pas d’actualité. Cela ne signifie pas pour autant que le processus de baisse soit terminé. Si l’économie s’essouffle dans les mois à venir (ce qui n’est pas notre scénario central), le taux pourrait être abaissé de 0,25 points de base de nouveau, à 1,75 %.

Risque financier contenu
À court terme, la situation politique française est le vrai sujet pour la BCE. Les signaux d’inquiétude et de défiance des investisseurs sont nombreux :
1) très nette sous-performance de l’indice boursier français CAC 40 par rapport aux équivalents
européens ;
2) évolution très défavorable des écarts de taux avec un taux d’emprunt à 10 ans qui est désormais similaire à celui de l’Italie et
3) hausse du coût d’une assurance contre un risque de défaut souverain à cinq ans qui est comparable à l’Italie et au Portugal, et bien supérieur à l’Espagne.

Panique ou déclassement ?
Pour l’instant, pas de panique. Les investisseurs étrangers, qui sont d’importants détenteurs de dette française, sont toujours au rendez-vous. Fin août, juste quelques jours après l’annonce d’un vote de confiance du Gouvernement français qui a amené ce dernier à démissionner, les Japonais ont acheté en grande quantité de la dette française.

Lors des émissions à long terme de la semaine dernière (10 et 30 ans), la demande a été très soutenue – similaire aux précédentes émissions de ce type.
Même l’euro, qui est un bon baromètre du risque souverain comme ce fut le cas pendant la crise souveraine de 2012, est plutôt stable. La paire EUR/USD semble pour le moment sur un statu quo. Il est probable que dans les jours et les semaines suivant le vote de confiance du 8 septembre, les taux longs français continuent d’augmenter, au moins jusqu’à ce qu’un nouveau Premier ministre soit trouvé.
C’est exactement ce qui s’est passé en décembre 2024 et janvier 2025 dans la foulée
de la censure du gouvernement Barnier. Par la suite, les taux ont légèrement baissé.
Pour éviter que des à-coups ne surviennent pendant cette période délicate, la BCE va
certainement veiller au grain. Comme ce fut le cas fin 2024, elle pourrait acheter en
catimini un peu plus de dette française et moins de dette des autres pays de la zone
euro, en jouant sur sa clé de répartition, afin de limiter l’envolée du coût d’emprunt. Ça
devrait être suffisamment une fois encore pour éviter une crise. L’arrivée du FMI à
Paris, évoquée ici et là, ou un moment Liz Truss semblent, pour l’instant, écartés.
Croissance européenne dynamique

À l’exception de la France dont l’activité devrait ralentir au troisième et au quatrième
trimestres en raison du contexte politique incertain qui incite à reporter les
investissements et à épargner, la dynamique est plutôt positive dans le reste de l’Union,
portée notamment par l’Espagne. En Espagne, la production est en forte progression,
soutenue par des taux d’emprunt et des prix de l’énergie bas, confirmant que les
années noires du pays ibérique sont de l’ordre du passé. Même l’Allemagne, qui a
connu des trimestres difficiles, avec une croissance nulle en 2025, devrait connaître le
retour de la croissance en 2026. Nous nous attendons à ce que le secteur
manufacturier renoue avec l’expansion dès les prochains mois. Dans l’ensemble,
l’activité économique en zone euro est résiliente, malgré la guerre commerciale qui,
finalement, semble avoir eu des effets négatifs plutôt limités sur la confiance des
entreprises et des consommateurs.

Enfin, dernier paramètre, central aux yeux de la BCE, l’inflation : cette dernière devrait
se stabiliser autour de 2,1 % au quatrième trimestre, avant de chuter nettement sous la
cible de la BCE à 1,8% en 2026. Dans ces conditions, le statu quo semble bel et bien la
meilleure des options pour l’institution européenne.

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