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La souveraineté numérique n’est pas une option

Olivier Arous – CEO d’OGO Security

Les données sont aujourd’hui le nerf de la guerre économique, l’Europe ne peut plus se permettre d’être dépendante des géants étrangers.

La souveraineté numérique n’est plus un sujet technique ni un simple débat philosophique sur la protection des données. C’est un enjeu stratégique qui conditionne notre indépendance économique, notre sécurité collective et notre capacité à innover. Tant que l’Europe dépendra massivement de technologies étrangères pour héberger ses données, développer ses applications et sécuriser ses réseaux, elle restera vulnérable aux pressions politiques et économiques venues d’ailleurs.

Des infrastructures dominées par les géants étrangers


Aujourd’hui, plus de 70 % des données européennes sont hébergées sur des clouds américains. Les grands hyperscalers (Amazon Web Services, Microsoft Azure, Google Cloud) offrent des solutions puissantes et abordables, mais au prix d’une dépendance juridique et technologique. Les lois extraterritoriales, comme le Cloud Act, permettent à un gouvernement étranger d’accéder à des données critiques. Cette situation pose un risque systémique pour nos entreprises, nos institutions et même nos citoyens. Reprendre la main sur les infrastructures numériques est une condition pour protéger notre économie et notre souveraineté décisionnelle.

Investir dans un écosystème compétitif et innovant


Construire la souveraineté numérique, ce n’est pas se replier sur soi, mais créer les conditions d’un marché dynamique. L’Europe dispose déjà d’acteurs performants tesl que OVHcloud, Dassault Systèmes, Scaleway, Outscale, mais ils doivent être soutenus à la hauteur de l’enjeu. Des partenariats publics-privés ambitieux, des financements ciblés et une commande publique orientée vers les solutions européennes peuvent stimuler cet écosystème. C’est aussi une opportunité économique : chaque euro investi dans les technologies locales génère de l’emploi qualifié et favorise l’innovation sur le continent.

Former les talents pour sécuriser l’avenir


La souveraineté numérique passe aussi par le capital humain. Sans ingénieurs, développeurs et experts en cybersécurité, aucune infrastructure souveraine ne peut fonctionner. Les universités et écoles d’ingénieurs doivent adapter leurs programmes pour répondre à la demande croissante de compétences dans le cloud, l’IA et la cybersécurité. La formation continue est tout aussi cruciale pour accompagner les entreprises dans leur transition.

Vers une gouvernance européenne de la donnée


La souveraineté numérique doit enfin s’accompagner d’un cadre clair et d’une gouvernance commune. Des initiatives comme Gaia-X ou le Data Act vont dans la bonne direction, mais elles doivent être accélérées et appliquées de manière cohérente dans tous les États membres. L’objectif : créer un espace européen de la donnée qui favorise l’interopérabilité, la transparence et la confiance, tout en préservant la compétitivité.


La souveraineté numérique n’est ni un luxe ni une option, c’est une urgence stratégique. Si l’Europe veut rester un acteur de premier plan dans l’économie mondiale, elle doit investir massivement dans ses infrastructures, soutenir ses champions technologiques et former ses talents. Ne rien faire, c’est accepter une dépendance qui limitera notre capacité à innover, à protéger nos citoyens et à défendre nos valeurs. Le temps d’agir, c’est maintenant.

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