Par Alexandre Baradez, Responsable Analyses Marchés d’IG France
Alors que la seconde vague de Covid-19 frappe de plein fouet la zone euro, les marchés tentent de résister aux craintes économiques, toujours largement soutenus par les banques centrales.
Entre les risques sanitaires, l’incertitude liée aux négociations sur le Brexit et l’ultimatum des démocrates aux républicains sur le plan de soutien économiques, la BCE a compris qu’il était nécessaire de rassurer les marchés financiers sur ses intentions. Sans oublier la dégradation des anticipations d’inflation moyen-terme en zone euro qui sont tombées ces derniers jours à leur plus bas niveau en 3 mois (proches de 1.10%), signe de l’inquiétude des investisseurs concernant la trajectoire de l’inflation et plus généralement de l’économie au moment où une large partie des pays européens adopte de nouvelles mesures de confinement partiel.
Plusieurs membres de la BCE se sont exprimés ces derniers jours et notamment Christine Lagarde qui a rappelé que la BCE n’avait « pas épuisé toutes les possibilités » de sa « boite à outils ». Elle fait écho aux propos de Gabriel Makhlouf la semaine dernière qui indiquait qu’aucune piste n’était écartée et que la BCE disposait d’une « importante boite à outils », ajoutant qu’il avait le sentiment que le Conseil des Gouverneurs allait devoir prendre de nouvelles décisions. Ce dernier précisant également qu’une baisse des taux ne serait pas l’instrument le plus approprié dans cette situation…laissant donc supposer que c’est le levier des achats d’actifs qui pourrait donc être intensifié.
Les marchés financiers sont donc tiraillés entre deux sentiments : celui de céder à la nervosité face au mur d’enjeux qui se dresse devant eux dans les jours qui viennent (négociations Brexit, deuxième vague Covid-19, résultats d’entreprises, négociations américaines sur le plan de relance économique, élection américaine) et celui d’épouser une nouvelle fois la communication des banques centrales qui ne semblent pas disposer à laisser se former le moindre épisode d’instabilité financière, aussi court soit-il.
Le CAC40 a réintégré le biseau de consolidation dans lequel il évolue depuis juin et duquel il est sorti par le bas en septembre mais également la semaine dernière. L’enjeu actuel consiste à déterminer si cette réintégration va se solder par un retour sur le haut de cette zone de consolidation vers 5100 points, ou plutôt si l’indice est en train de former progressivement un sommet depuis quelques mois, après le puissant rallye de mars à juin, avant une nouvelle phase de volatilité et donc une rechute temporaire avant la « vraie » phase de reprise haussière.
Cette question se pose sur la plupart des indices européens et américains : simple phase de consolidation après un gros rallye et précédant une sortie par le haut, ou sommet de moyen-terme en formation avant une nouvelle phase de stress ? (si l’hypothèse nouvelle vague de stress se matérialisait elle serait obligatoirement moins forte que celle de mars, traduisant surtout un mouvement de réplique après l’épicentre du stress au premier trimestre, sur fond de risque d’une rechute de la croissance au 4ème trimestre sous l’effet des mesures de confinement partiel).
Les mouvements des indices américains ces derniers jours sont assez liés à l’évolution des anticipations concernant le plan de soutien économique mais il est nécessaire de continuer à surveiller l’évolution des sondages nationaux. Même si Joe Biden devance toujours largement Donald Trump, on note un petit resserrement des pourcentages la semaine dernière et ce week-end. Ce n’est pas l’hypothèse la plus probable, mais si ce mouvement devait se renforcer dans les jours qui viennent, les marchés pourraient à nouveau « pricer » le scénario d’un scrutin serré avec risque de contestation du résultat et donc plus de volatilité à la clé.
L’indice de volatilité du SP500, le VIX, continue d’évoluer entre 25 et 30 depuis plusieurs semaines, la sortie de cette « zone » devrait donner le sens de la prochaine tendance pour les indices américains…et donc probablement aussi pour les indices européens.