Sat. Nov 23rd, 2024

Par Robeco

Au quatrième trimestre 2018, nous avons vendu en pensant que tout allait bien. Il est désormais temps d’acheter quand tout semble aller mal.

À la publication de nos dernières perspectives trimestrielles, début octobre 2018, les actions américaines venaient d’enregistrer leur plus longue période de baisse depuis l’élection de Donald Trump. La question était alors de savoir si Wall Street allait entrer dans une phase baissière et entraîner avec elle d’autres places boursières. Notre réponse est toujours la même : non. Pourquoi ? Parce que le « Grand Maître des Marchés » n’est autre que le président Trump : l’homme qui détient les clés du conflit commercial et qui a, selon nous, largement contribué à la dégringolade des places boursières. Nous nous étions dit qu’en cas de marasme prolongé, de nouvelles mesures de relance pourraient être promises. Ou peut-être que Washington se montrerait plus conciliant vis-à-vis de Pékin.

 

Et voilà que le 30 novembre à Buenos Aires, à l’ouverture du sommet du G20, Donald Trump se rapproche de Xi Jinping, le président chinois ! Les deux hommes décident de repousser de 90 jours l’augmentation des droits de douane prévue pour le 1er janvier et d’entamer des négociations. Cela n’a pas été un long fleuve tranquille. Mais ce n’est jamais le cas. L’arrestation de la directrice financière de Huawei, pépite technologique chinoise, a fait douter les marchés de la possibilité d’un accord. D’autant qu’il s’agirait moins d’un accord que d’une trêve dans un conflit idéologique qui devrait opposer la Chine et les États-Unis dans la durée. À l’heure où nous écrivons ces lignes, les négociations se poursuivent. Une issue favorable allégerait considérablement la pression qui pèse sur les marchés boursiers.

 

Les actions émergentes ont largement surclassé Wall Street

Nous affirmons depuis un certain temps déjà qu’une bonne nouvelle sur le front douanier pourrait se traduire par un rebond (qui serait particulièrement net sur les marchés les plus malmenés, par exemple les actions émergentes). Même au plus fort de l’épisode de volatilité de décembre dernier, alors que la situation commerciale restait floue et que tous les grands marchés reculaient, les actions émergentes ont largement surclassé Wall Street, suivies par l’Europe et le Japon. Cela ne nous a pas étonné.

 

Durcissement de la Fed au moment où la croissance mondiale est menacée par le protectionnisme, difficultés géopolitiques dans les pays émergents et en Europe, vigueur du dollar qui s’en est suivie : la guerre commerciale n’a pas été le seul obstacle sur le chemin des actions non américaines en 2018. Et c’est au moment où les investisseurs ont compris que ce savant mélange d’événements néfastes pour les marchés boursiers hors États-Unis serait tout aussi désastreux pour les marchés américains que Wall Street a commencé de piquer du nez. Clap de fin pour cette période enchanteresse où la prime de risque des actions américaines était tombée à un point bas historique par rapport aux autres grands marchés : il était tout bonnement impossible que les bénéfices américains soient épargnés par des maux qui touchaient tout le reste de la planète.

 

Il est temps d’aller voir ailleurs qu’aux États-Unis

En dollars, les marchés émergents, l’Europe et le Japon ont sous-performé le S&P 500 en 2018. Et même si l’on inclut la surperformance de décembre, leur retard reste proche de 10 %. Alors que les risques géopolitiques et la menace de récession dans certains pays européens devraient empêcher la volatilité de retomber sur le Vieux Continent, l’avenir des actions japonaises et émergentes est moins incertain, la plupart des catalyseurs négatifs potentiels étant connus et intégrés par les marchés.

 

Les investisseurs ont par exemple intégré un scénario catastrophe sur les marchés émergents, avec une sous-performance de 17 % par rapport aux valeurs américaines entre janvier et novembre 2018.

 

Mais tout n’est pas rose non plus. La croissance des résultats marque le pas et l’économie chinoise continue de ralentir. Les publications financières n’ont donc pas fini de réserver de mauvaises surprises. Mais les bénéfices devraient tout de même progresser de 9 % en 2019 et une grande partie des révisions à la baisse de ces derniers mois s’explique par les répercussions directes et indirectes du conflit commercial (les entreprises ayant été effectivement touchées ou décidant de dépenser avec davantage de prudence). Un accord entre Donald Trump et Xi Jinping ne changerait pas totalement la donne pour les perspectives de résultats, mais il aurait au moins le mérite d’éclaircir l’horizon. Le ralentissement structurel de la croissance chinoise va se poursuivre, mais Pékin peut encore gérer un atterrissage progressif avec des mesures de relance, que notre équipe d’investissement s‘attend à revoir dans le courant de l’année.

 

Parallèlement, sans pour autant disparaître, les autres problèmes qui avaient mené la vie dure aux actions émergentes en 2018 se résolvent peu à peu. D’une part, la Réserve fédérale américaine (Fed) s’est récemment montrée plus accommodante, laissant espérer une suspension temporaire des relèvements de taux. Elle devrait continuer de réduire son bilan, mais le fait qu’elle avance plus prudemment indique que, si les perspectives macroéconomiques le permettent, elle pourrait marquer une pause dans son processus de durcissement quantitatif. Si la Fed se fait plus conciliante et que la conjoncture américaine est moins favorable, l’ascension du dollar devrait elle aussi prendre fin. D’autre part, un certain nombre d’autres points de tension (notamment les élections au Brésil et au Mexique) sont désormais derrière nous.

 

Des risques toujours bien présents

Pour autant, nous ne pensons pas que tout est réglé. Des risques sont toujours présents, mais la roue tourne. La Fed est plus conciliante, Xi Jinping et Donald Trump se parlent, l’administration américaine semble plus encline à entériner un accord et les problèmes géopolitiques se résolvent : autant d’épées de Damoclès qui s’éloignent peu à peu des marchés émergents. Si cela se traduit aussi par une normalisation du dollar (dans le sillage d’une décélération de l’économie américaine et d’une Fed plus prudente), ce que nous attendions tous devrait se produire : après avoir vendu en pensant (à tort) que tout allait bien, il faudra acheter en pensant (à tort) que tout va mal.

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