Thu. Nov 21st, 2024

Par Scander Bentchikou, Analyse-gestionnaire au sein de Lazard Frères Gestion

Quel sera l’impact de la baisse du prix du baril sur le secteur bancaire européen ?

Le prix du baril subit actuellement un choc d’offre de grande ampleur qui, s’il s’avérait durable, devrait avoir des
implications positives à moyen terme pour l’économie mondiale. Ce choc d’offre se conjugue avec une baisse de la
demande. D’après l’Agence Internationale de l’Énergie, la demande de pétrole pourrait baisser pour la première fois
depuis 10 ans. Bien que ce déséquilibre offre/demande puisse fragiliser les finances publiques des pays exportateurs de
pétrole (Iran, Émirats Arabes Unis, Qatar, Bahreïn, Irak, Nigéria, Angola, Vénézuela, Équateur, Russie). La baisse du
baril est une bonne nouvelle pour le monde en général et l’Europe en particulier.
Elle aura, en revanche, des conséquences notables sur la filière pétrolière. Première conséquence de la baisse du cours du
pétrole, la diminution des investissements pourrait se traduire par un fort ralentissement de l’activité des sociétés de
services pétroliers mais aussi par une forte réduction de la profitabilité des exploitants de pétrole de schiste.
Le secteur bancaire européen catalyse une nouvelle fois les craintes du marché en la matière et baisse dans les mêmes
proportions que le Brent depuis la mi-février (plus de 30%). Sans grande surprise, l’exposition des banques européennes
au secteur pétrolier est significative, que ce soit en proportion de ses crédits ou – plus important encore – de ses fonds
propres.

Pour autant, les montants d’exposition brute de chacune des banques européennes n’apportent en réalité que peu
d’enseignements. Certains segments de la filière ne présentent pas, par nature, un profil de risque élevé (trade
finance/négoce, majors/pétrolières intégrées, midstream/transport & stockage, entreprises publiques, filière gaz).
D’autres, à l’inverse, seront tout particulièrement exposés (producteurs indépendants, pétrole de schiste et services
parapétroliers).

En 2015 et 2016, le secteur bancaire européen avait également souffert des inquiétudes liées à la dégradation des
perspectives du secteur pétrolier en abandonnant la moitié de sa capitalisation boursière. À l’époque, les encours sur le
secteur pétrolier pouvaient paraître significatifs. Mais nous avons depuis pu constater que l’exposition aux segments les
plus risqués (secteur parapétrolier et producteurs indépendants) n’était pas de nature à menacer significativement les
fonds propres des banques européennes. Nous devrions donc bientôt en avoir la confirmation et, à ce stade, nous
estimons que moins de 5% des fonds propres du système bancaire européen sont réellement à risque.

 

Conclusion
Si l’exposition brute du secteur bancaire européen au secteur pétrolier à fin 2019 est connue, les banques n’ont pas encore
eu l’occasion de communiquer le détail de leur sensibilité. Cela ne saurait tarder. Il faut cependant s’attendre à ce que le
coût du risque progresse désormais en Europe. Les impacts liés à la recherche d’un nouvel équilibre pétrolier viendront
s’ajouter à des perspectives de croissance qui se sont dégradées en 2020 compte tenu de la pandémie de Coronavirus. Ces
perspectives se traduiront également par une augmentation des pertes sur les crédits. Les banques européennes ont dû
progressivement s’adapter à un monde de taux bas. Elles devront désormais également s’adapter à un coût du risque un
peu plus élevé.

 

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