par David Taieb, CIO – Listed Assets au sein de Sienna IM
À moins de deux semaines de l’élection présidentielle américaine, Kamala Harris et Donald Trump restent au coude-à-coude. Selon un sondage du New York Times du 25 octobre 2024, Harris dispose d’une légère avance nationale avec 49 % des intentions de vote contre 48 % pour Trump.
D’après l’agrégateur Real Clear Politics, l’écart entre les deux candidats s’est resserré, leurs courbes de popularité se rejoignant presque. Dans les États clés, la tendance se divise : le Nevada et le Michigan penchent en faveur de Harris, tandis que Trump progresse en Arizona, Géorgie et Pennsylvanie. En Caroline du Nord et au Wisconsin, les deux candidats sont à égalité. Ces faibles écarts, combinés à la marge d’erreur des sondages et à l’indécision de certains électeurs, maintiennent une grande incertitude sur l’issue de cette élection.
Deux scénarios économiques distincts se dessinent pour les marchés en fonction du résultat de l’élection :
Scénario 1 : Victoire de Kamala Harris (démocrate)
La candidate démocrate propose une politique de hausse des impôts pour les ménages les plus riches et les entreprises afin de financer davantage de dépenses sociales.
• Fiscalité accrue : Le programme prévoit une augmentation du taux d’imposition des sociétés de 21 % à 28 %, annulant en partie les réductions de 2017 sous Trump. Les grandes entreprises très profitables verraient un relèvement du taux minimal d’imposition et une hausse de la taxe sur les bénéfices réalisés à l’étranger (de 10,5 % à 21 %). La taxe sur les rachats d’actions passerait de 1 % à 4 %. Côté ménages, les plus aisés seraient soumis à une augmentation du taux marginal d’imposition de 37 % à 39,6 %, avec un taux minimal de 25 % pour ceux dont le patrimoine dépasse 100 millions de dollars ou le revenu annuel excède 1 million de dollars.
• Investissements industriels et technologiques : Harris prévoit des crédits d’impôt pour moderniser les usines et encourager l’innovation dans des secteurs stratégiques comme la biotechnologie, l’aérospatial, l’intelligence artificielle et l’énergie nucléaire. D’autres mesures visent à encourager la production domestique de semi-conducteurs et à réduire les émissions de CO2 dans la sidérurgie.
→ Ce programme pourrait exercer une pression baissière sur le marché des actions, notamment dans les secteurs de la technologie et de la santé, du fait de l’augmentation de la fiscalité.
→ Les obligations souveraines américaines pourraient bénéficier de taux d’intérêt plus bas, ce qui affaiblirait légèrement le dollar.
Scénario 2 : Victoire de Donald Trump (républicain)
Un retour marqué au protectionnisme est attendu, plus prononcé qu’en 2018-2019, accompagné de nouvelles incertitudes géopolitiques dans un contexte international plus instable qu’en 2017.
• Pérennisation des baisses d’impôts : Le maintien des réductions d’impôts de 2017 stabiliserait le taux de l’impôt sur les sociétés à 21 %. Cette politique vise à soutenir la compétitivité des entreprises américaines et à favoriser la croissance de leurs bénéfices au-delà de 2026.
• Protectionnisme renforcé : Trump propose des hausses tarifaires substantielles, avec un droit de douane de 10 % sur toutes les importations et de 60 % sur les produits chinois. Ces mesures protectionnistes augmenteraient les coûts des intrants pour les entreprises américaines, exerçant une pression sur leurs marges et intensifiant les tensions commerciales, notamment avec la Chine.
→ Dans ce contexte, les secteurs de la défense, de l’énergie et certaines industries domestiques pourraient bénéficier des mesures protectionnistes et des réductions fiscales, tandis que les entreprises dépendant fortement des importations (logistique et production manufacturière) verraient leurs marges comprimées.
→ Le programme de Trump pourrait également pousser les taux d’intérêt à la hausse et soutenir le dollar.
Le bilan
Quel que soit le vainqueur, les stratégies d’investissement et les dynamiques de marché varieront sensiblement. Une victoire de Kamala Harris favoriserait les obligations et pourrait peser sur les actions américaines, notamment dans les secteurs technologique et santé, tout en soutenant la transition énergétique et les valeurs européennes grâce à un dollar plus faible. À l’inverse, une victoire de Donald Trump, avec la pérennisation des baisses d’impôts et un protectionnisme renforcé, avantagerait l’énergie, la défense et les industries domestiques, mais risquerait d’alimenter l’inflation et de maintenir des taux élevés, soutenant le dollar et amplifiant les tensions commerciales, notamment avec la Chine.