Tue. Nov 5th, 2024

Par Ophélie Mortier, stratégiste en investissement responsable et durable chez DPAM

2020 : Régulation, climat et droits de l’homme à l’honneur

Alors que 2020 débute, nous nous penchons sur les thèmes de développement durable qui sont les plus susceptibles de dominer les marchés cette année. Bien que déjà visible en 2019, le rôle de la régulation et de la réglementation deviendra clairement une priorité absolue en 2020. Nous prévoyons une forte hausse du nombre de mesures législative visant à accélérer la transition vers une économie à faible intensité de carbone.

Bien que le changement climatique demeure une priorité absolue, un nombre croissant de défenseurs sont favorables à une meilleure hiérarchisation des préoccupations : en d’autres termes, ils préconisent de mettre davantage l’accent sur le coût social associé à la lutte contre les problèmes environnementaux en général et le changement climatique en particulier. En effet, la dimension sociale reste essentielle dans les analyses ESG. Les droits de l’homme, en particulier, deviendront de plus en plus un sujet de préoccupation majeur pour les parties prenantes.

De toute évidence, le changement climatique continuera à dominer les débats entre les investisseurs, les régulateurs et les décideurs politiques. Bien qu’il soit déjà un sujet de discussion depuis plusieurs années, l’accent principal s’est légèrement déplacé vers les risques physiques du changement climatique, le besoin d’innovation et la question du recyclage.

Enfin, les actions concrètes. Ces dernières années, nous avons observé l’émergence de plusieurs initiatives en matière de coopération, de lobbying, d’investissements, de droits des actionnaires, etc. Bien que ces initiatives aient souvent été bénéfiques en permettant une plus grande prise de conscience, elles ont tendance à rester abstraites. Désormais, les investisseurs et les parties prenantes sont à la recherche de faits et d’actions concrètes. Il est temps de montrer le véritable impact. Cela vaut également pour les discussions sur les stratégies et les produits durables. La recherche d’impact et de preuves tangibles des réalisations en matière d’ESG est devenue de plus en plus prégnante ces derniers temps. Ces tendances sont susceptibles de devenir d’une importance cruciale pour les actionnaires dans les années à venir.

  • Régulation – une réglementation inévitable

Nous avons assisté à un durcissement impressionnant de la réglementation, sous l’impulsion de la Commission européenne et de son Plan d’action sur la finance durable. Salué comme un exemple de politique ambitieuse, le Plan d’action est présenté et débattu dans le monde entier pour encourager les autorités de régulation et les décideurs politiques mondiaux à agir eux aussi.

En effet, au cours des 15 derniers mois, les institutions européennes ont réussi à proposer une taxonomie verte, une réglementation sur les indices de référence à la fois à faible teneur de carbone et a impact positif, ainsi qu’une réglementation sur l’information en termes d’investissements durables et des risques liés.

Vers zéro émissions nettes

Par ailleurs, la nouvelle Commission européenne vient de publier son Green Deal Européen, qui constitue la pierre angulaire de ses politiques durables. La nouvelle Commission européenne de Mme Von der Leyen sera certainement aussi active que la Commission Juncker sur le sujet (sinon plus). La première ambition du Pacte Vert porte sur un mécanisme pour certains secteurs exposés au risque de fuites de carbone. Ensuite, la première loi européenne sur le climat est attendue pour mars 2020 et visera à atteindre la neutralité climatique d’ici 2050. En outre, une troisième initiative impose des objectifs de décarbonisation plus élevés et plus agressifs d’ici 2030, en vue de parvenir à terme à zéro émissions nettes.

Les actions de l’UE ont suscité certaines inquiétudes quant à la compétitivité des entreprises européennes. Cette inquiétude est principalement due au risque de fuites de carbone (c’est-à-dire le risque de transférer la production vers d’autres pays en raison du coût des systèmes de tarification carbone). Il s’agit d’un risque majeur pour l’Europe, car une part importante des activités pourrait être transférée à l’étranger pour éviter les dernières exigences réglementaires du système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE). Il existe à ce jour 51 systèmes de tarification du carbone dans le monde. Un prix du carbone qui fait consensus au niveau mondial est très probablement impossible. Cependant, plusieurs économistes réputés, lauréats du prix Nobel et anciens présidents de la Réserve fédérale ont proposé une taxe verte aux frontières et un dividende carbone dans leur ” Déclaration des économistes sur les dividendes carbone “.

Leur idée principale est d’encourager la création d’une taxe nationale sur le carbone, doublée d’une taxe verte aux frontières pour garantir que la compétitivité nationale reste intacte.

 

Une implication accrue des banques centrales : prendre le climat au sérieux

La décarbonisation – en particulier avec un objectif de zéro émissions nettes – exige une accélération sur le plan politique. Les banques centrales ainsi que les autorités financières et monétaires, qui forment le cœur même du système financier, doivent également prendre leur part de responsabilité. La Banque d’Angleterre, la France et les Pays-Bas ont créé conjointement le Network for Greening the Financial System (NGFS) pour promouvoir l’Accord de Paris. Plusieurs exemples d’initiatives ont été fournis en 2019, la Banque d’Angleterre étant parmi les précurseurs, mais aussi les Pays-Bas, la France et, finalement, la BCE.

 

Des mesures politiques inévitables

La prise de conscience et l’élan croissant concernant les questions climatiques conduiront à une réglementation accrue (et de plus en plus ambitieuse) à court terme. Aux États-Unis, de récentes discussions indiquent que le changement climatique pourrait devenir un sujet décisif lors des prochaines élections présidentielles, qui pourraient s’avérer être un autre tournant pour des mesures législatives. C’est ce que signifient les Principes pour l’Investissement responsable (PRI) soutenus par l’ONU avec le Programme Réponse politique inévitable (IPR). Partant du postulat que les marchés financiers et de capitaux ne valorisent pas correctement le risque carbone, le projet IPR prévoit une réponse d’ici 2025 qui sera à la fois énergique et brutale en raison de l’inaction prolongée qui a prévalue jusqu’ici.

  • Les droits de l’homme – la responsabilité du monde financier aussi

Le changement climatique a eu une influence notable sur le rôle de plus en plus réglementé du monde financier. Nous nous attendons à ce que les droits de l’homme aient un impact similaire. Les entreprises – tant financières que non financières – doivent être tenues responsables des violations potentielles des droits humains fondamentaux. Ces violations peuvent concerner le travail forcé, la servitude pour dettes, la traite des êtres humains et d’autres pratiques analogues à l’esclavage.

L’initiative Liechtenstein, la Commission du secteur financier sur l’esclavage moderne et la traite des êtres humains, a été lancée en septembre 2018. Depuis lors, elle a officiellement reconnu la responsabilité des entreprises en la matière. Leur plan directeur pour la mobilisation de fonds contre l’esclavage et la traite exige que le secteur financier adhère aux principes suivants :

– Respect des principes de lutte contre l’esclavage et la traite

– Pratiques de prêt et d’investissement responsables

– Technologie financière, inclusion financière et modèles de réglementation

 

  • – Accords de conduite responsable des affaires et régimes de sanctions
    Changement climatique – plus de progrès

Il est évident que les questions climatiques resteront l’un des sujets les plus urgents en 2020 et au-delà. Les autorités de régulation et de surveillance ont formellement reconnu le risque économique. Le débat sur la question de savoir si nous devons l’intégrer dans les modèles d’évaluation financière est clos désormais. Nous devrions maintenant nous concentrer sur la meilleure façon d’intégrer ce facteur. Les modèles d’évaluation et les analyses sont constamment affinés pour offrir une distinction plus claire entre les risques physiques et les risques de transition.

Après avoir mis sur le focus sur le changement climatique, notre regard se porte désormais sur les solutions innovantes et les investissements. En ce qui concerne les solutions, les programmes (encore controversés) de capture et de stockage du carbone deviendront de plus en plus pertinents. D’autres pistes concernent la compensation carbone. Aujourd’hui, il s’agit principalement de projets de reforestation ou – dans une moindre mesure – de boisement. Les technologies d’élimination du carbone sont encore en phase de recherche, mais il est probable que ces solutions prendront progressivement de l’importance dans un avenir proche. Pour être impactantes, elles nécessiteront un soutien financier important. Il est important de garder à l’esprit que ces technologies d’élimination du dioxyde de carbone ne sont en aucun cas une solution miracle. Elles servent plutôt de solution complémentaire aux autres options écologiques. Elles nesont certainement pas une excuse pour diminuer nos efforts en matière d’efficacité énergétique, d’énergies renouvelables, de réduction des émissions, etc.

 

Agir maintenant – Impact et résultats

Si le monde moderne est compliqué et complexe – comme l’a affirmé M. Vladimir Poutine à Greta Thunberg – le temps et la patience ne sont pas une solution. Il y a un besoin pressant de procéder à une “transition urgente” du système financier, c’est pourquoi il est temps d’agir maintenant. Ce sentiment d’urgence est également reflété dans le titre du sommet mondial du PPR à Paris en septembre 2019.

On ne compte plus le nombre d’initiatives autour de non seulement le changement climatique, mais aussi les droits humains, la chaîne d’approvisionnement, la gouvernance d’entreprise, etc. Ce nombre impressionnant est à la fois positif et prometteur. Ce nombre impressionnant est à la fois positif et prometteur. Cependant, le moment des nouvelles initiatives est peut-être passé. Le temps est venu d’examiner leurs résultats et de montrer les avantages pratiques qu’elles nous ont apportés.

Il en va de même pour les stratégies dites durables. Le temps où l’on se contentait de supprimer de son portefeuille les entreprises les plus mauvaises de leur catégorie est révolu. La recherche d’un impact ESG (et particulièrement d’un impact positif) est plus évidente que jamais.

This challenging attitude towards information is a positive evolution, as it promotes accurate data and ethical behaviour. As ESG disclosure eventually becomes a requirement for all companies – both financial and non-financial – it will be important to look at the evolution of the proposed standardized disclosure framework. The Global Reporting Initiative, the Sustainability Accounting Standards Board (SASB) framework, etc. could become the new norm. Consequently, investment professionals will likely have to familiarise themselves with these information frameworks.

Cela exige des évaluations d’impact qui vont au-delà du simple reporting. Mais surtout, cela exige une pléthore de données. Les investisseurs sont plus que jamais sensibilisés au développement durable et l’investissement responsable. Leurs approches, méthodologies et normes sont de plus en plus détaillées et substantiellement plus matures. Par conséquent, il reste crucial de résoudre le défi posé par les données ESG. Les fournisseurs de données ESG sont beaucoup plus intransigeants en ce qui concerne la pertinence de leurs notations, leur engagement envers les entreprises et leurs capacités prédictives. Cette attitude de défi envers l’information est une évolution positive, car elle favorise des données précises et un comportement éthique. Comme la divulgation de données ESG finit par devenir une exigence pour toutes les entreprises – tant financières que non-financières – il sera important d’examiner l’évolution du cadre de divulgation standardisé proposé. La Global Reporting Initiative, le cadre du Sustainability Accounting Standards Board (SASB), etc. pourraient devenir la nouvelle norme. Par conséquent, les professionnels de l’investissement devront probablement se familiariser avec ces cadres d’information.

Les points clés :

– Le rôle de la régulation et de la réglementation deviendra clairement une priorité absolue en 2020

– Le changement climatique continuera à dominer les débats entre les investisseurs, les régulateurs et les décideurs politiques. L’attention s’est légèrement déplacée vers les risques physiques du changement climatique, le besoin d’innovation et la question du recyclage.

– Action concrète : la recherche d’un impact et de preuves tangibles des réalisations ESG a n’a cessé de gagner en importance ces derniers temps.

– Stratégies durables : au-delà du simple reporting. Il reste crucial de résoudre les défis posés par les données ESG. Des cadres d’information standardisés pourraient devenir la nouvelle norme

 

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