William Gerlach – International Account Management & Dealing chez IbanFirst, analyse en temps réel les premières conséquences de l’élection sur le billet vert.
Si l’on ne connaît pas encore de manière certaine le vainqueur de l’élection aux États-Unis, un grand gagnant sort du lot : le dollar américain.
A 1,07, l’EUR/USD faiblit au lendemain du scrutin américain. Il pourrait s’agir d’une réaction aux annonces des premiers États remportés par Donald Trump. S’agit-il d’une tendance pérenne ? Quel que soit le vainqueur de cette élection, le dollar restera fort.
L’indice du dollar est en zone de surachat, ce qui est habituel avant une élection présidentielle. Cependant, ce qui est plus inhabituel, c’est la force du dollar par rapport à la quasi intégralité des devises. Par exemple, en excluant les devises russes et chinoises qui ne fluctuent pas librement sur le marché, le dollar atteint un niveau record face aux devises des marchés émergents. Même lorsque la Fed a augmenté ses taux en 2022, la monnaie n’avait pas atteint un tel niveau. Cela s’explique par deux principaux facteurs structurels :
Tout d’abord, la surperformance de l’économie américaine.
Nous prévoyons une croissance de 2,7 % cette année aux États-Unis, alors qu’elle pourrait atteindre tout au plus 1,2 % dans la zone euro. L’année prochaine, la croissance américaine devrait se maintenir proche de son potentiel, autour de 2 %, tandis qu’elle chutera à 0,7 % dans la zone euro. La trajectoire de croissance des États-Unis est unique dans un monde de faible croissance.
La forte résilience de l’économie américaine repose sur des dépenses publiques élevées – le déficit devrait rester proche de 5 à 7 % du PIB pour au moins les trois prochaines années. Même si les marchés s’inquiètent parfois du déficit américain, nous considérons que, puisque le dollar est la seule monnaie de réserve mondiale, il y aura toujours des investisseurs étrangers prêts à acheter des bons du Trésor.
La bonne santé surprenante des consommateurs américains est l’autre facteur qui tire l’économie vers le haut. En effet, environ 60 à 70 % des ménages américains sont… riches, très riches. Selon des données de l’Université du Michigan, 37 % de la population possède une maison valant plus de 500 000 dollars, et 30 % dispose d’un portefeuille d’actions valant plus de 500 000 dollars. C’est un record.
Deuxième raison de ce dollar fort : le marché boursier américain est le plus performant des marchés développés dans le monde et représente désormais 50 % de la capitalisation boursière mondiale. C’est un autre record. Les actions de haute technologie, telles que Meta, Google, Apple et Nvidia, dominent la révolution numérique et de l’intelligence artificielle. Elles captent la majorité des flux d’investissements et affichent des performances inédites. Par exemple, le cours de l’action Nvidia a augmenté de 182 % depuis le début de l’année.
Dans ce contexte, sans surprise, les excédents des entreprises mondiales, des institutions financières, des États et de l’épargne des ménages sont transférés aux États-Unis à la recherche de rendements élevés sur les investissements. Historiquement, l’excédent des pays émergents a toujours été dirigé vers les États-Unis. Ce qui est plus surprenant, c’est que ce phénomène touche désormais aussi l’Europe. Les excédents européens sont directement injectés dans l’économie américaine alors qu’ils restaient autrefois en Europe pour soutenir les petites et moyennes entreprises locales. Des flux massifs de capitaux pénètrent en permanence le marché américain, ce qui soutient structurellement le taux de change du dollar.