Thu. Nov 21st, 2024

17ème édition de l’étude sur le marché des produits de luxe du cabinet de conseil en stratégie Bain & Company, en collaboration avec la Fondation Altagamma  (Association des professionnels du marché du luxe en Italie).

Sept tendances qui définiront l’avenir du luxe.

Le marché du luxe continue de rayonner. Le marché du luxe dans son intégralité – tenant compte des biens personnels et des expériences de luxe – a cru de 5 % à taux de change constant en 2018 pour atteindre environ 1 200 milliards d’euros, avec des performances globalement positives sur tous les segments.

La performance des produits personnels de luxe a dépassé celle du marché avec 6 % de croissance à taux de change constant pour atteindre 260 milliards d’euros, confirmant une ère de « nouvelle normalité ». A l’avenir, cette tendance de croissance positive devrait se confirmer avec un taux annuel compris entre 3 et 5 % par an jusqu’en 2025 – portée par des fondamentaux favorables dans le marché – pour atteindre 320 à 365 milliards d’euros.

Néanmoins, les questions sociopolitiques, les politiques commerciales et des récessions mineures de court terme pourraient rendre quelque peu chaotique ce chemin vers la croissance.

« L’année dernière, le marché du luxe a retrouvé une croissance saine, à un rythme modéré », déclare Marc-André Kamel, Associé chez Bain & Company. « Cette tendance perdure en 2018, confirmant la « nouvelle normalité » que nous annoncions auparavant, caractérisée par la demande florissante des clients chinois, la montée en puissance des canaux en ligne et l’influence croissante des jeunes générations de consommateurs. »

La consommation de luxe des clients chinois reste inégalée en 2018

Les consommateurs chinois insufflent une tendance de croissance positive à travers le monde. Entre 2015 et 2018, leurs achats en Chine continentale ont apporté au marché mondial une croissance 2 fois supérieure à celle de leurs achats à l’étranger. Leur part dans les dépenses mondiales a continué d’augmenter (estimée à 33 % des dépenses mondiales dans le luxe contre 32 % en 2017), pendant que la part du marché chinois s’est rehaussée de 8 % en 2017 à 9 % en 2018. En Chine continentale, les ventes de produits de luxe ont progressé de 18 % à taux de change courant (20 % à taux de change constant) pour atteindre 32 milliards d’euros, portées par une demande en forte croissance, plutôt que par une hausse des prix.

La croissance des achats de produits de luxe au Japon a légèrement ralenti, incitant les marques à trouver des solutions pour faire revenir les consommateurs en boutique. Toutefois, les ventes au détail ont continué d’augmenter de 3% à taux de change courant pour atteindre 22 milliards d’euros. Le développement de la consommation des touristes au Japon pousse les marques à repenser leur modèle de distribution.

Dans les autres pays d’Asie, les ventes de détail ont cru de 7 % à taux de change courant pour atteindre 39 milliards d’euros, grâce à une croissance dynamique en Corée du Sud, portée par une forte consommation locale. Une croissance soutenue dans les autres pays asiatiques – Singapour, la Thaïlande et Taiwan – a également été au rendez-vous. Hong Kong et Macao ont été portés par le tourisme chinois.

L’Europe accuse un tassement de la croissance en raison de l’euro fort qui a amputé le pouvoir d’achat des touristes. La consommation locale a globalement été positive, bien que la performance soit mitigée selon les pays, ce qui a contribué à une croissance des ventes à 1% à taux de change courant pour atteindre 84 milliards d’euro.

Le marché du continent américain a progressé de 5 % à taux de change courant pour atteindre 80 milliards d’euros. Une économie américaine positive a stimulé le revenu disponible et les dépenses de luxe des consommateurs locaux, mais les marques sont dubitatives quant à la pérennité de la croissance économique. Un dollar fort a affecté les dépenses des touristes venant d’Asie et d’Amérique Latine. Le Canada et le Mexique restent des marchés notables dans la région, alors que les incertitudes politiques du Brésil ont entamé sa performance.

Dans le reste du monde, la croissance a été de 0 % pour atteindre 12 milliards de d’euros, principalement en raison de la stagnation au Moyen-Orient provoquée par une récente restriction des dépenses du gouvernement.

  Les entreprises dans le secteur du luxe

Les consommateurs font de plus en plus d’achats en ligne

Les ventes dans les magasins en propre ont progressé de 4 % en 2018, les trois quarts de cette performance provenant d’une croissance des ventes à périmètre constant. Les ventes par le biais du canal « Wholesale » (grands magasins, boutiques multimarques, etc.) ont seulement progressé de 1%, un ralentissement causé par les difficultés des grands magasins haut de gamme qui tentent toujours de se redresser et par le ralentissement des magasins spécialisés qui s’emploient à résister à la concurrence du commerce en ligne.

Le commerce de luxe en ligne a confirmé son accélération en 2018 par rapport aux canaux physiques de distribution, affichant une croissance de 22 % par rapport à 2017 pour atteindre 27 milliards d’euros. Le marché américain représente près de la moitié des ventes en ligne – 44 % – mais l’Asie apparaît comme un nouveau moteur de croissance sur ce segment, suivie de près par l’Europe. Les accessoires restent la catégorie phare des ventes en lignes devant la mode; la beauté ainsi que la joaillerie et l’horlogerie sont en hausse. Les sites de vente en ligne des marques de luxe rattrapent leur retard avec 31 % des parts de marché contre 39 % pour les revendeurs en ligne spécialisés et 30 % pour les sites en ligne des distributeurs généralistes.

« Les nouvelles technologies enrichissent les expériences en ligne et sur portable mais elles mettent potentiellement en péril le rôle traditionnel des magasins physiques. » déclare Joëlle de Montgolfier, Directrice Senior du pôle Etudes & Recherche pour la grande consommation, la distribution et le luxe. « Les ouvertures de boutiques de luxe ralentissent, on devrait assister à une consolidation de ce canal de distribution dans le futur. Les marques doivent donc repenser le mix et le rôle de leurs canaux physiques, faire passer le rôle des boutiques de « point de vente » à « point de contact » et utiliser les nouvelles technologies pour améliorer l’expérience client en magasin. »

Aujourd’hui le consommateur de luxe est plus jeune… et plus singulier

Il est de plus en plus difficile pour les marques de luxe de nier l’influence des jeunes générations. En 2018, les générations Y et Z ont fourni 100 % de la croissance du marché du luxe contre 85 % en 2017.

En réaction, le marché du luxe évolue et innove pour s’adapter à leurs préférences en termes d’offre produit, de moyens de communication ou encore à leur engagement dans les médias. Par exemple, la génération Z, bien que la plus petite du marché (2 % en 2018 mais vouée à atteindre 10 % en 2025) fait déjà preuve de préférences très distinctes des précédentes générations. Ils sont plus « individualistes », plus enclins à effectuer leurs achats dans les boutiques physiques (mais en attente d’une expérience digitale améliorée) et plus axés sur les logos bien qu’étant moins fidèles aux marques.

Le secteur reconnait également de plus en plus les préférences de culture et de taille. La mode dite « modeste » a représenté environ 40 % du marché des vêtements de luxe pour femme en 2018, ce qui inclut à la fois les vêtements créés spécialement pour les femmes musulmanes mais aussi les pièces de style naturellement plus modeste et pudique. La mode « inclusive » a représenté 20 % du prêt-à-porter féminin, les marques de luxe produisant davantage de vêtements destinés aux consommatrices dotées de formes généreuses ou aux plus grandes tailles, avec des vêtements plus amples et des coupes plus inclusives.

Dans l’ensemble, les souliers et la joaillerie ont été les catégories enregistrant la plus forte croissance à 7 % chacune, suivies par les sacs et la beauté. Le marché de l’horlogerie est resté stable, tandis que la mode a souffert de la baisse du prêt-à-porter pour hommes.

En 2018, le marché du luxe d’occasion a bondi en raison d’une forte croissance en Europe, qui représente plus de la moitié de ce marché, ainsi que d’une forte croissance des plateformes en ligne spécialisées. La joaillerie et l’horlogerie sont les catégories phares en seconde main.

Le luxe en 2025 – 7 grandes tendances

  1. Plus d’achats chinois… en Chine – Les consommateurs chinois représenteront au moins 45 % du marché (contre environ 33 % en 2018) et ils achèteront la moitié de leurs produits de luxe chez eux, en Chine.
  2. E-Commerce et digital impacteront chaque achat – Bain & Company estime que le commerce en ligne représentera 25 % du marché en valeur d’ici à 2025 – contre 10 % aujourd’hui – cannibalisant les canaux de distribution plus traditionnels. 100% des achats de produits de luxe seront influencés par internet. De plus, à l’avenir, 50 % des achats dans le luxe seront facilités par les technologies numériques, grâce à l’usage croissant des nouvelles technologies tout au long de la chaine de valeur, tels que réalité virtuelle ou paiement mobile.
  3. La consolidation des points de ventes façonnera le magasin du futur – La réduction du trafic dans les boutiques physiques, induite par le digital, conduira à une consolidation de l’ensemble des points de vente, à l’instar de ce qui s’est déjà passé pour d’autres types de distributeurs (ex : musique, livres). Par conséquent, le rôle du magasin tel qu’il existe aujourd’hui va inévitablement évoluer : du simple « point de vente » au véritable « point de contact » avec les clients.
  4. Un marché plus jeune bouleversera la trajectoire de croissance du luxe – Les nouvelles générations vont devenir le premier moteur de croissance dans les années à venir. La génération Z et les milléniaux (génération Y) représenteront environ 55 % du marché en 2025 et contribueront à hauteur de 130 % à la croissance durant cette période.
  5. Les cultures et sous-cultures prendront le pas sur les tendances de consommation – Les cultures (religions, ethnies) et sous-cultures (minorités) façonneront la mode et le luxe en 2025. Les groupes culturels vont étendre leur influence sur les tendances de consommation. Les marques de luxe devront les reconnaitre et s’en occuper pour rester pertinentes.
  6. Un marché unique pour servir des marchés d’une personne – Les marques, en 2025, expérimenteront un chevauchement des frontières concurrentielles typiques. Le modèle standard des marques, qui croissent soit en se spécialisant sur une catégorie, soit en se diversifiant au travers d’un positionnement plus généraliste, sera poussé aux extrêmes.
  7. L’agilité est la nouvelle norme – Cette année a confirmé la tendance à la hausse de la profitabilité – 20 % de marge d’EBIT en 2018 contre 19 % en 2017. Néanmoins, la rupture numérique continuera de modifier le profil des dépenses stratégiques des marques et leurs comptes de résultats. La rentabilité se stabilisera si les marques adoptent une approche plus « agile » tout au long de la chaîne de valeur.

« Tous les signaux pointent vers des changements significatifs pour les marques de luxe dans les années à venir. » ajoute Marc-André Kamel. « Elles peuvent faire face à ces ruptures en gardant à l’esprit 3 stratégies-clés : prendre l’initiative de développer des approches innovantes pour s’adapter aux tendances de marché et s’adresser aux nouveaux consommateurs ; élaborer une formule gagnante différenciée, et se tourner vers les nouvelles générations. L’émergence de nouvelles technologies est la base de toutes ces stratégies et jouera un rôle crucial de facilitateur pour les marques d’ici à 2025. »

A propos de Bain & Company
Bain & Company est le cabinet de conseil en management reconnu par les dirigeants pour sa capacité à matérialiser des impacts et des résultats dans leurs organisations. Bain & Company conseille ses clients, entreprises et fonds de Private Equity, sur leur stratégie, les opérations, la technologie, l’organisation et les fusions-acquisitions. Les associés et les équipes de Bain & Company développent des recommandations qui peuvent être effectivement mises en œuvre par les entreprises et s’assurent qu’elles auront ensuite la compétence et l’autonomie pour préserver ces progrès et la valeur de cet investissement. Pour garantir l’alignement des intérêts du cabinet avec ses clients, Bain & Company n’hésite pas à indexer ses honoraires sur la performance constatée de ses interventions. Fondé en 1973, Bain & Company s’appuie sur 57 bureaux dans plus de 36 pays pour accompagner les entreprises de tous les secteurs d’activité et sur tous leurs marchés.

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