Tue. Oct 8th, 2024

Par Olivier de Parcevaux, gérant obligataire au sein du Groupe Corum Butler

A l’issue des résultats du second tour des élections législatives, le “spread OAT-Bund”, indicateur de la confiance dans le “risque France”, devrait continuer à se détendre, ce qui pourrait se traduire positivement sur le CAC 40, l’euro mais aussi le segment obligataire du haut rendement, aussi appelé “high yield”.

Les urnes ont parlé ; et le moins que l’on puisse dire est que leur message est inattendu. Ainsi,
par le jeu des désistements, non seulement le Rassemblement National n’a pas obtenu de
majorité absolue, mais il a terminé, en nombre de sièges, à la dernière place des trois blocs qui
s’affrontaient, devancé par la Majorité Présidentielle mais surtout par le Nouveau Front Populaire
qui termine en pôle-position, bien que très loin de la majorité absolue.
D’une certaine façon, le coup de dé d’Emmanuel Macron, pour incompréhensible qu’il ait pu
paraître, est un succès : les « extrêmes » (LFI et le RN) sont ramenées à la portion congrue et un
certain « cercle de la raison » domine.
Du point de vue des marchés financiers, cette remise au pas des « extrêmes » est une bonne
nouvelle qui devrait permettre que la détente observée entre les deux tours se poursuive. A plus
long terme, cependant, la situation politique inédite dans laquelle la France vient de basculer
comporte des incertitudes qu’il faudra lever pour que cette dynamique se consolide.
Quant au Marché du Haut Rendement, notre marché de prédilection, déjà fortement résilient et
placide avant ces élections, il devrait conserver son orientation positive.


L’appétit des investisseurs pour le risque “France”, le facteur clé pour anticiper l’évolution
des marchés financiers, particulièrement sur la place de Paris

Ce qui fait peur aux marchés, ce sont évidemment les risques de troubles à l’ordre public à l’issue
des élections ou la conduite d’une politique qui soit trop défavorable aux entreprises… Mais, plus
profondément, ce sont les craintes relatives à la position budgétaire de la France, déjà délicate,
et le risque de dépenses considérables et non financées (ou mal financées), telles qu’elles
pouvaient apparaître dans les programmes du Rassemblement National ou du Nouveau Front
Populaire.
D’où la sensibilité du sujet de la dette française et l’importance du spread OAT-Bund, qui est
l’écart de rendement entre la dette d’Etat française et la dette d’Etat allemande. Dit plus
simplement, l’Allemagne est l’étalon de comparaison économique pour les autres pays
européens : on se compare au « premier de la classe » et plus on s’en éloigne, moins c’est bon !

Le “spread OAT-Bund”, indicateur de la confiance dans le “risque France”, devrait continuer
à se détendre après ce second tour, et impacter positivement le CAC 40 et l’euro


Le “spread OAT-Bund” constitue le thermomètre de l’appétit des investisseurs pour le risque
« France » et il donne le “la” de la performance des autres actifs financiers. Son augmentation,
dès le lendemain de l’annonce des nouvelles élections, signalant un mouvement de défiance des
investisseurs à l’égard de la dette française, a entraîné avec lui la chute de l’Euro et du CAC40. Le
spread est alors passé de 0.48% à 0.56%, déclenchant une chute de 2.62% du CAC40 et un repli
de l’euro de 1.080 à 1.075 contre le dollar.
Dans les deux semaines qui ont suivi et jusqu’à l’annonce des résultats du premier tour, il y a eu
des moments de rebond ou du répit, mais dans l’ensemble, la direction était claire et à
l’augmentation, témoignant de l’inquiétude des investisseurs. Le 28 juin, à la veille du week-end
du premier tour, le spread a atteint 0.81%, le CAC40 a chuté de 6.53% et le taux de change de
l’euro est passé à 1.07.
A contrario, au lendemain du premier tour, alors que le spectre d’une majorité absolue de l’un ou
l’autre des deux blocs de « rupture » (RN et NFP) semblait s’éloigner, les premiers signes de
détente sont apparus sur le marché de la dette française, soutenant le CAC40 et l’euro.
Les résultats du second tour confirmant ce scénario, on peut s’attendre à une poursuite du reflux
du spread et à ce que CAC40 et euro continuent à combler leurs pertes.

Au sein des marchés financiers, la placidité du Haut Rendement Européen a été
particulièrement remarquable, ce qui permet d’être optimiste sur la poursuite de sa solide
dynamique


En ce qui concerne notre marché de prédilection, le Haut Rendement Européen, force est de
constater que malgré sa réputation de forte sensibilité au risque, celui-ci a jusqu’à présent
observé les événements avec une grande placidité.
Pour rappel, le marché du Haut Rendement représente une partie du marché dit “obligataire”, sur
lequel des entreprises empruntent auprès d’investisseurs, contre une rémunération régulière
sous forme de taux d’intérêt (le “coupon”). Il regroupe pour l’essentiel, des entreprises de taille
intermédiaire ou ayant fait l’objet d’une acquisition avec recours à l’endettement comme CMA-
CGM, Rexel, Elis, Kiloutou, Elior, Picard ou encore SFR.
Ce marché a ainsi montré sa résilience au cours des deux semaines pendant lesquelles le CAC40
chutait lourdement et que l’euro fléchissait, en ne cédant que 0.01%, ce qui est marginal. Il faut
dire que depuis octobre 2022, ce marché bénéficie de fondamentaux particulièrement solides
couplés à des rendements attractifs (de l’ordre de 6.5% actuellement) qui lui ont permis de
délivrer des performances particulièrement stables depuis 18 mois.
Dans ces conditions, plutôt qu’à un véritable rebond après une baisse qui ne s’est pas produite,
on peut plutôt s’attendre à ce que le marché du Haut Rendement reprenne la marche en avant
sans véritable anicroche qui est la sienne depuis octobre 2022.

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