Thu. Nov 21st, 2024

Finie la politique de « forward guidance » ; aujourd’hui, les banques centrales dépendent des données. Et cela représente une mauvaise nouvelle pour les marchés. La politique monétaire étant désormais plus incertaine que jamais, des mouvements financiers massifs peuvent survenir à tout instant. Dans ce contexte, à quelle politique s’attendre de la part de ces institutions, une semaine avant leurs réunions de politique monétaire ? Les détails avec William Gerlach, Directeur régional France et Royaume-Uni chez iBanFirst. 

 

Fed : l’incertitude règne

Nous pensons que le consensus est bien trop optimiste en ce qui concerne la dynamique de l’inflation. La plupart des banques centrales seront donc contraintes de resserrer davantage leurs taux d’intérêt par rapport aux prévisions. Et cela devrait être la politique adoptée par la Réserve Fédérale américaine (Fed) la semaine prochaine lors de son comité de politique monétaire (FOMC). 

Le marché s’attend à une pause suivie d’une hausse de 25 points de base pour porter les taux d’intérêt à 5,25 – 5,50% le 26 juillet suivie d’une autre pause en septembre. Selon nous, la décision du FOMC est bien plus incertaine. 

Certes, des éléments plaident pour une pause en ce mois de juin. Les principaux indicateurs et les données indirectes (notamment l’indice manufacturier PMI de Chicago) confirment que le risque de récession augmente considérablement. Mais de l’autre côté du spectre, les derniers chiffres de l’emploi indiquent qu’un resserrement pourrait être nécessaire pour s’assurer que les pressions inflationnistes ne réapparaissent pas. Effectivement, les dernières données de l’emploi en mai ont surpris avec près de 340 000 emplois créés contre 195 000 attendus. Cela plaiderait donc en faveur d’au moins une ou deux autres hausses des taux. 

Le comité de politique monétaire de la Fed est bien plus effrayé de ne pas en faire assez que d’en faire trop pour lutter contre l’inflation. Nous privilégions le scénario suivant : une hausse en juin et en juillet avant de faire une pause. Une baisse des taux, prévue par le marché en novembre, est à exclure selon nous. Un niveau anormalement élevé d’incertitude monétaire est susceptible d’augmenter la volatilité du marché des changes à court terme (qui jusqu’à présent est restée contenue) et de favoriser le dollar américain. Cependant, il est encore trop tôt pour savoir si le rééquilibrage en cours des traders en faveur du billet vert va perdurer. 

 

La “fatigue de printemps” sévit dans la zone euro

De l’autre côté de l’Atlantique, il n’y a presque aucune incertitude quant à l’issue de la réunion de politique monétaire de la Banque Centrale Européenne (BCE) la semaine prochaine. Après un bon départ en début d’année, l’économie de la zone euro subit une importante fatigue de printemps. L’indice Sentix de confiance des investisseurs, qui donne un aperçu global de l’état économique de la zone euro, a chuté de manière significative de 4,4 points pour atteint -13,1 en mai. Sans aucun doute, l’économie de la zone euro s’en est mieux sortie que ce que beaucoup craignaient à l’automne. Cependant, le spectre des pénuries d’énergie plane toujours. L’inflation reste incroyablement élevée et entrave les dépenses des consommateurs. 

Tout cela contribue à un climat économique morose. Alors que l’inflation demeure la principale préoccupation, la BCE a toutes les raisons d’augmenter les taux d’intérêt de 25 points de base la semaine prochaine. Cela est d’ailleurs déjà intégré dans les prix du marché. D’un autre côté, bien que les taux d’intérêt continuent d’augmenter, nous ne voyons aucun risque de fragmentation financière dans la zone euro. Les réinvestissements du PEPP (Programme d’achat d’urgence pandémique) maintiennent les taux sous contrôle. La BCE a récemment confirmé qu’elle avait continué d’acheter de la dette italienne pour un montant de 3,2 milliards d’euros en avril et en mai. Cela fait de l’Italie le plus grand bénéficiaire cumulatif depuis juin 2022. Cela devrait perdurer et ainsi éviter une répétition de la crise de la dette de 2012 : une autre raison expliquant pourquoi la BCE pourrait continuer à augmenter les taux à court terme. 

 

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